« Le cinéma c’est une industrie, mais malheureusement, c’est aussi un art… »
Hannah Arendt (philosophe allemande et americaine) affirme que la culture « ne doit répondre à aucune utilité fonctionnelle et ne doit pas donner lieu à un processus de consommation [elle doit être] délibérément écartée des processus de consommation et d’utilisation ». Or le fait marquant de la culture au XXe siècle, c’est qu’elle est devenue une industrie obéissant aux lois du marché. Les premiers à avoir vivement critiqué ce modèle sont les sociologues se réclamant de l’école de Francfort, en particulier Adorno et Horkheimer qui forgent le terme “d’industrie culturelle”.
Selon eux, “l’art est devenu une marchandise puisque tout est bizness”, on produit donc des “tubes” pour la chanson, des “best-sellers” pour les livres, et des “stars” pour le cinéma en éliminant toute originalité et toute forme d’imagination. Pour ces auteurs “l’industrie culturelle” est synonyme de manipulation, les “mass-médias” entrainent la société moderne dans “une dépravation de la culture, et elle fait progresser l’incohérence barbare dans les esprits ».
Pour Rémy Rieffel cette vision est “manichéennes et caricaturales”, il oppose 3 arguments à cette thèse :
— Leur analyse n’est pas du tout empirique, “et ne repose sur aucune enquête de terrain”
— “L’école de Francfort sous-estime la capacité de création et d’imagination des individus vivant en société”
— Enfin, “toutes les études montrent que les pratiques singulières du consommateur sont infiniment plus diversifiées qu’on ne le croit”.
Nous avons tenté de définir les industries culturelles, mais quelles sont les caractéristiques qui les définissent aujourd’hui ? Pour R.Riffel, économiquement et socialement, “les médias jouent un rôle clé. Ils sont en effet devenu des instruments incontournables, des intermédiaires obligés. Entre d’un coté, la fabrication de biens cultuels (en amont) et de l’autre leur utilisation par le consommateur (en aval). On note de plus que les grands groupes de communication tentent d’effectuer ce que les économistes appellent une ‘diversification verticale’, c’est-à-dire de contrôler d’un bout à l’autre la production de bien (un éditeur de journaux qui tente d’acheter une imprimerie par exemple…). Il faut donc, et c’est important, prendre conscience du poids économique des industries culturelles.
De nos jours les industries culturelles tendent vers une concentration de secteur et une extension de marché. On assiste autrement dit à une mondialisation du secteur (On entend souvent dans l’actualité, des rachats, alliances, ou rapprochement dans le secteur de l’audiovisuel). On assiste donc ces dernières années à une « dynamique de convergence entre l’audiovisuel, les télécoms, et l’informatique et à la constitution d’un marché géant […] à vocation planétaire ». Attention à ne pas se méprendre, mondialisation ne signifie pas aplanissement des moyens d’accès à la culture, les disparités entre pays existent bel et bien. En France la tendance à la concentration est moins forte que dans le reste du monde, à l’exception de Lagardère médias, il n’existe pas de grands groupes, ces derniers détiennent tout de même, en vrac : les magazines Elle et Paris-Match, télé 7 jours, les kiosques Relay, Virgin, Europe 1, Hachette Livre… Il y a donc tout de même une tendance à l’uniformisation : « l’offre de programme s’uniformise progressivement à cause de la recherche maximale du profit et des lois de la concurrence ». On retrouve […] la même logique dans l’édition […] : Hachette Livre et Editis […] Ces 2 groupes produisent prés de 60 % des livres de poche, 80 % des manuels scolaires et 90 % des dictionnaires […]. Le constat est clair : dans chaque secteur de la production de biens culturels, quelques grands groupes s’accaparent la plus forte part de marché. Il faut se rendre à l’évidence. Cette nouvelle forme d’industrialisation semble irréversible.